Une Occitane en Bretagne

2011 : Une année de pannes. Vivement 2012 !



L'Occitane a passé l'hiver 2010/2011 au port de Rohan (entre Loudéac et Pontivy) sur la digue de séparation avec la rivière Oust. Malgré la neige, puis les mouvements d'eau, elle y a joui d'une tranquillité absolue, loin des nuisances et harcèlements qu'on doit supporter ailleurs, en particulier sur le canal d'Ille-et-Rance et la Vilaine.


Avant le retour de la chaleur, nous avons profité de la fraîcheur de fin d'hiver pour regarnir nos stocks de confits de canard et de foie gras à la Lescommères (recette familiale secrète) : une semaine de travail à deux. Puis, nous avons réparé les freins AR du carrosse de la patronne, sérieusement fatigués. Malheureusement, après remontage, un conduit bouché bloque le piston, plaquant la garniture contre le tambour, et provoquant ainsi une nouvelle panne. Nous devons donc remplacer les durites bouchées et, de nouveau, refaire les mêmes freins. L'année commence bien !


Mais, ce n'est qu'un commencement. Nous nous préparons au départ. Le temps de faire les pleins, nous découvrons qu'un de nos réservoirs fuit. Devant les risques de pollution, il est impossible de partir dans ces conditions ; il faut le déposer pour l'expertiser. Mais il est plein. Après avoir transféré 40 litres dans le réservoir de la voiture, nous distribuons gratuitement le reste aux voisins qui ne refusent pas. Irréparable, ce réservoir doit être remplacé ; nous devrons nécessairement en faire fabriquer un nouveau, sur mesures, et ce n'est pas donné. En attendant, nous alimenterons le moteur directement depuis un bidon de 20 litres solidement arrimé qu'il faudra remettre à niveau souvent pour ne pas tomber en panne sèche ! Et ça continue !


Devant retourner au chantier pour continuer nos travaux, nous devons choisir :

Le temps passant, la température montant, les herbes proliférant, nous décidons de partir pour Pontivy où nous y attendrons l'arrivée de la péniche, toujours bloquée par ailleurs.


A 15 minutes en voiture, Pontivy sera atteint après 3 jours de navigation effrénée, au cours desquels on s'occupe exclusivement à franchir les 60 écluses des échelles qui permettent de passer du bassin de l'Oust à celui du Blavet. L'horizon est essentiellement limité à l'écluse à venir et à l'écluse passée. Heureusement, qu'on apprécie beaucoup cette merveilleuse campagne désertique qui renifle si bon le purin de la Bretagne profonde. Et dire que certains prétendent que l'agriculture perdrait du terrain !


Cette fois-ci, nous parvenons à atteindre le centre de Pontivy du premier coup, contrairement à 2010 où nous avions été obligés d'attendre 2 jours que le chenal soit dégagé. Question de nous ré-acclimater aux douces senteurs de la circulation routière, nous restons quelques jours à Pontivy. Les nouvelles de la grosse péniche ne sont pas bonnes : elle s'est si bien coincée dans une écluse, qu'il faut en tronçonner les défenses pour la libérer. Elle n'est pas prête d'arriver. Aussi, décidons-nous de quitter Pontivy et de reprendre notre périple en direction du chantier du Rudet, doucement, de sorte que la péniche, une fois décoincée, finisse par nous rattraper, nous dépasser pour s'y présenter devant nous, conformément au planning établi.


Le chantier du Rudet a été créé dans l'arrière-pays de Lorient. C'est un de ces merveilleux « trous » à la française, sans aucun moyen de télécommunication : ni téléphone, ni internet, juste la télé, et à condition d'avoir une parabole. Mais, c'est un super chantier où on peut réaliser tous les travaux possibles et imaginables ! Nous passons l'été à lancer de multiples animations : remplacement des panneaux de plancher du séjour qui sont pourris, traitement des fonds correspondants, peinture de la salle des machines et du pick avant, finition des mises aux normes demandées par l'expert en 2010, obturation de 7 aérateurs (il en reste encore 5 à traiter), et autres bricoles qui ne sont toujours pas finies, comme une prise d'eau ou la fabrication d'un nouveau toit sur la marquise (nous y reviendrons). Le temps passe et, comme certains biefs de la rivière Blavet doivent être vidés pour travaux, nous devons quitter le chantier plus tôt que prévu et remonter rapidement vers Pontivy, pour éviter de rester bloqués ici tout l'hiver. Ainsi, partant avec près de 2 mois d'avance, on peut prévoir de visiter des sites inhabituels, comme le fief de Yves Rocher à la Gacilly, ou le port des Forges où nous pourrions terminer les travaux en cours, voire tester des restaurants, et autres distractions estivales. On peut rêver, non ?


Pas évident, pourtant. Une fois sortis des zones critiques à vidanger, nous faisons halte au premier quai, celui de Boterneau, juste le temps d'un week-end, afin que Laurent, qui rentre chaque fin de semaine, puisse nous y retrouver facilement. En fait, nous y resterons trois semaines : panne de voiture de Laurent, panne de voiture de Simone, panne de voiture de Jérome qui passait par là, panne de moteur bateau... Sur ce site sans eau, ni électricité, ni téléphone, ni internet, ni télévision, nous assimilons parfaitement ce que signifie « parcimonie ». Nous y faisons connaissance des indigènes: des gens charmants, dont 2 sujets de sa très gracieuse Majesté qui construisent leur bateau de toutes pièces sur le quai. Tous ont remarqué notre présence rapidement, sans doute grâce aux 8 heures de musique à 67dB que diffuse tous les 2 jours notre groupe électrogène à échappement libre. Mais, le principal problème du groupe électrogène, c'est qu'il n'est pas régulé. Pour fournir 230V à pleine charge, il faut le régler à 300V à vide. Du coup, le lave-linge et la yaourtière, qui restent branchés en permanence, même à l'arrêt, n'apprécient pas du tout et rendent l'âme sans prévenir. Génial : Si on est débarrassé de la corvée de lessive, on n'a plus de dessert non plus !


Une fois les pannes réparées, nous reprenons notre voyage vers Pontivy. Mais notre optimisme tombe vite : le niveau d'encombrement de la rivière par les herbes aquatiques est tel qu'il finit par nous bloquer complètement. Nous devons faire appel à l'Administration qui, en dépit de nos multiples tentatives en autonome, infructueuses, doit nous haler sur 10km, jusqu'à l'entrée de la ville de Pontivy. Nous tenons ici à donner un coup de chapeau à cette Administration qui a mis à notre disposition un tracteur, un fourgon et trois éclusiers très compétents et expérimentés pour nous sortir de ce bourbier, et déplacé ses cadres pour constater la gravité de la situation et s'assurer que nos problèmes se terminent au mieux. Qu'ils en soient loués !


D'escale à Pontivy, nous en profitons pour remplacer le réservoir percé, dont nous avions lancé la fabrication depuis plusieurs jours, et pour réparer encore la 309, qui a été assez maligne pour réussir à perdre son pot d'échappement sans qu'on s'en rende compte. Mais, à plus de 600 000Km, on lui pardonne, pour l'instant... Puis, nous attendons l'opportunité d'un anticyclone, qui nous garantisse le passage du dernier pont voûté sans encombre.


Nous quittons Pontivy un matin de bonne heure, et attaquons les 60 écluses pour passer du Blavet sur l'Oust. Malgré la densité des plantes aquatiques, nous réussissons à passer sans recourir au halage. Si la navigation s'améliore après Rohan, les éclusiers s'opposent à ce que nous nous rendions au port des Forges : sûr qu'on va s'y embourber dans les herbes et là, il leur sera impossible de venir nous chercher dans ce petit port isolé. Pour les Forges, c'est loupé ! Aussi, passant à proximité, pour se venger, on se donne le temps de tester la « Crêperie des Forges ». Déception : nous n'y reviendrons pas ! Toutes ces difficultés de navigation ne resteront pas sans conséquences, puisque nos bagues de palier extérieur des hélices, que ces conditions de navigation usent anormalement, commencent à battre bruyamment. Déjà que les piétons du troisième âge arrivent à nous dépasser sans forcer, même avec des cannes, désormais, nous devrons naviguer encore plus lentement, jusqu'au remplacement des paliers. Pour ce faire, comme nous ne pouvons plus revenir au chantier, nous n'avons d'autre possibilité que d'aller nous échouer à marée haute sur une cale près de St-Malo, afin de réparer à marée basse. Mais, St-Malo, c'est à l'autre bout de la Bretagne...


Et à cette vitesse, à force d'accumuler les retards, nous n'y sommes pas encore, d'autant plus que, de passage à Josselin, nous devons attendre une semaine à l'ombre sous les tilleuls, le passage de la canicule de l'année. Nous en profitons alors pour tester le meilleur restaurant du coin, la « Table d'O », que nous recommandons vivement en raison de l'excellent rapport qualité/prix pour une cuisine haut de gamme ! Sublime : Nous y reviendrons. En attendant, le temps passe. Partis depuis près de deux mois, nous n'avons pas encore parcouru le tiers du voyage. Nous quittons Josselin et son magnifique château (que nous avions visité en 2010) et, comme nous ne rencontrons plus d'herbes aquatiques, tout s'accélère ; nous dévalons la descente de la rivière Oust, grillons les arrêts à Montertelot, Malestroit, Peillac, pour atteindre l'Ile-aux-Pies, à St-Vincent-sur-Oust, où Laurent nous rejoint le temps d'un week-end. De là, nous traversons Redon et remontons la Vilaine à toute vapeur, pour atteindre Rennes en moins de 4 jours. Cependant, pas question de stationner à Rennes : les quais, minables, sont livrés à la délinquance. Nous repartons. Attendant l'ouverture des portes devant l'écluse principale de la ville, le vent déporte gentiment le bateau, jusqu'à ce que le toit de la marquise le stabilise contre la voute du pont. Grosse colère : le nouveau toit, toujours pas fini, est déjà cassé.


Mais la fête n'est pas finie. Le temps d'un week-end, nous arrêtons au quai de St-Grégoire, en proche banlieue de Rennes, où Laurent doit nous rejoindre, pour y réparer le toit de la marquise. On ne sait pas pourquoi, mais la voiture de Simone ne s'y plaît pas : elle rend l'âme : chaîne de distribution et moteur cassés ! Irréparable, irrécupérable, direction le cimetière des autos ! Nous voilà à pieds ! Contrariés, nous déménageons aussitôt pour Betton, plus commode, en raison de la proximité immédiate du marché, des commerces, des transports en commun et des services. Nous y attendons l'arrivée d'un anticyclone garantissant au minimum 4 jours consécutifs sans pluie ni vent, permettant de traverser la section suivante où nous serons obligés de naviguer marquise pliée pour passer sous les ponts bas. Dès que possible, nous fonçons.


Mais pas pour longtemps. Entrant dans l'écluse Ille, un bloc de racines, tapi entre deux eaux, vient bloquer une hélice dans la tuyère. Il aura fallu que l'éclusier plonge pour nous dégager. Résultat : nous réalisons là notre meilleure performance en 10 ans : 1 jour pour faire 2 Km, soit 83m/H, un record ! Du coup, impossible de rallier le quai le plus proche et sa prise de courant, même en naviguant le dimanche. Quant à l'idée de réparer le palier avant l'hiver, il y a longtemps qu'on n'en parle plus.


Nous continuons jusqu'à Tinténiac (notre domicile officiel) que nous atteignons le dernier jour d'ouverture de la navigation, après 2 mois et demi. Il était temps. Surprise : pendant notre absence, le tarif des prestations a été multiplié par 4, atteignant des niveaux inimaginables : Nous entrons donc en négociation avec la mairie et attendons le verdict du maire. Maintenant que la navigation est arrêtée, si les ennuis pouvaient en faire autant, on apprécierait un peu !


Que non : l'année n'est pas terminée ; la pompe sanitaire se met à fuir, laissant la citerne se déverser doucement dans les fonds qu'il faut donc assécher chaque jour, et, pire, le chat Virgile décide de tomber malade !


Nous espérons vivement que cette « annus horribilis » se termine au plus vite, et que l'année prochaine sera moins problématique.


Dès l'ouverture, au printemps prochain, nous devrons remplacer les batteries, usées après 10 ans de bons et loyaux services, et terminer la station de pompage des eaux, avant de reprendre notre voyage jusqu'à Plouer/Rance pour effectuer la réparation du palier. Après quoi, nous redescendrons dans le Midi (de la Bretagne), là où les ponts sont assez hauts pour être franchis sans casse, et où les quais sont agréables et tranquilles.


En attendant, un petit clin d'oeil de Virgile pour commencer l'année 2012 !